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Merci pour tout ce que tu as représenté pour moi. Merci de
m’avoir précédé en chaque étape de la vie. Je te laisse aujourd’hui me précéder
dans la mort.
Merci pour la musique. Merci pour tes disques de Pink Floyd,
Jethro Tull, Jimi Hendrix, Simon and Garfunkel, Steppenwolf, CCR, Leonard Cohen
et les Moody blues.
Merci pour le seul karaoké que j’ai chanté de ma vie. Born to be wild en duo dans un bar à NDG. Et
encore toutes nos excuses aux clients présents ce soir-là.
Merci pour les soirées sur la rue Saint-Denis, notamment au
Lézard et au Passeport.
Merci aussi pour tes livres. Merci pour Arsène Lupin, Bob
Morane et Georges Orwell. Merci d’avoir passé le réveillon du nouvel an de
décembre 1983 à m’avoir si longuement parlé de 1984.
Merci pour les Tintin que tu me prêtais dans les années
1970. Merci d’en avoir discuté avec moi. Merci également d’y avoir caché un
jour un numéro de Playboy entre Le Secret de la licorne et Le
Trésor de Rackham le Rouge. Qui sait si tout cela n’a pas avoir avec ma
carrière professionnelle. Mon prochain psy me le dira.
Merci encore pour toutes les conneries que tu as faites à
l’adolescence (et celles faites par mes sœurs). Quand je suis passé par là à
mon tour, disons que papa et maman en avait vu bien d’autres.
Merci pour ton voyage de deux semaines en Europe en 1972.
Merci surtout de nous l’avoir raconté pendant les 40 années suivantes.
Merci pour les parties d’échec. Et la dernière qu’on a
faite, par correspondance, au début des années 1990. On aurait pu la terminer
si on avait réussi à se rappeler à qui c’était le tour.
Merci de m’avoir initié au golf avec papa dans les années
1980. Désolé de ne pas avoir continué. Mais les étés passés à Sainte-Adèle et à
l’Estérel demeurent parmi mes plus beaux étés.
Merci pour le recueil de poésie que tu as écrit à 17 ans. 17
ans plus tard, alors que j’avais à mon tour 17 ans, j’ai également écrit et
relié à la main quelques (mauvais) poèmes. Je n’oublierai jamais ta face quand
tu avais mis la main dessus dans ma chambre. Nous avions tous les deux mis le
même titre à nos velléités poétiques : Condoléances.
Merci à nous deux d’avoir détruit ces fascicules de
mauvaises poésies. Nous n’étions pas Rimbaud, ni un ni l’autre.
Merci pour toutes les bières et bouteilles de vin partagées
au fil des années. Merci pour tous les repas pris en famille.
Merci surtout d’avoir toujours conservé cet esprit de
famille si fort chez nous.
Et merci pour cette dernière semaine. On se voyait moins
souvent depuis mon déménagement à Gatineau. Je suis très heureux d’avoir pu
t’accompagner durant tes derniers jours. J’ai lu cet été le dernier livre de
Gil Courtemanche, Je ne veux pas mourir seul. J’avais peur que tu
t’éteignes sans la présence d’un membre de ta famille. Merci de m’avoir choisi
pour cette dernière épreuve. Merci de m’avoir permis de te tenir la main durant
les dernières minutes, les dernières secondes.
Merci finalement pour la sérénité avec laquelle tu as
affronté ton dernier voyage. Je sais que tu avais hâte de retrouver ta blonde
et que tu es heureux aujourd’hui d’être avec elle. Même si on aurait aimé te
garder plus longtemps avec nous.
Embrasse-la de ma part. Embrasse maman. Embrasse papa.
Embrasse Gaby.
Merci d’avoir été mon frère. D’avoir été mon grand frère.
Sylvain
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