Et
cette phrase attribuée à Winston Churchill (traduite librement par
moi) : «Celui qui n’est pas un libéral à 20 ans n’a pas de cœur; celui qui
n’est pas conservateur à 40 ans, n’a pas de cerveau.»
J’ai
toujours admiré Winston Churchill pour son sens de la répartie. Mais cette
phrase, j’ai toujours su que je n’allais jamais y adhérer.
Je
vais avoir 43 ans dans quelques jours et je constate que les idéaux et les
valeurs que je défendais à 20 ans sont les mêmes qui m’habitent aujourd’hui.
Après avoir énormément lu et m’être beaucoup informé ces dernières vingt
années, force m’est de constater que les discours des lucides et des tenants du
néolibéralisme n’ont jamais réussi à me convaincre de retourner ma veste.
Au
contraire, je suis de plus en plus convaincu des iniquités de la société et du
devoir de résistance qui en découle.
Si
mon désir de justice social, mon envie de défendre les plus démunis, mon besoin
de vouloir parler pour les sans-voix veulent dire que je suis sans cervelle, eh
bien, je le revendique avec plaisir. À défaut de cervelle, j’ai toujours mon
cœur de 20 ans.
Mais
avec le cœur, vient une voix.
Se taire n’est pas une
option
Maryse
Gaudreault, la député de Hull au provincial, l’a dit : «Ce groupe de
professeurs [Les profs contre la hausse] ne cherche qu’à politiser le débat et
ce n’est pas leur rôle. Ces professeurs sont des employés de l’État, ils n’ont
pas à se mêler de tout ça» (Le Droit, 19 avril 2012, page 6).
Un professeur,
partisan de la hausse, me l’a répété : «Nous avons le devoir de rester
neutres».
Un autre
collègue, chargé de cours dans un autre département, me l’a crié dans les
corridors de l’Université «C’est de votre faute si les étudiants sont en
grève! Par vos actions, vous êtes
responsables de tout cela». J’ai essayé de discuter, mais face à son ton
agressif, j’ai abandonné la conversation. En le quittant, à mon «Bonne
journée», il a répliqué : «Bonne journée ! Et enlevez immédiatement votre
carré rouge!»
Rester
neutre ? Se taire ? Je ne crois pas. En tant qu’intellectuels et professeurs
d’université, il est de notre devoir, au contraire, d’intervenir dans l’espace
public. Je le fais régulièrement en ce qui concerne la bande dessinée, mon
champ de recherche, en collaborant avec les journaux, la radio et la
télévision.
Mais
nous sommes également des citoyens et, de par notre position et notre capacité
à réfléchir et à analyser, nous nous devons d’apporter notre voix aux débats de
société. Comme l’a fait le sociologue Pierre Bourdieu lors des grèves en France
en 1995.
Et
lorsque ce débat concerne l’université et, surtout, son accessibilité et sa
gérance, nous ne pouvons observer tout cela en restant cois. Nous sommes les
premiers acteurs dans ce dossier et, à ce titre, nous avons le devoir, au
contraire, de faire entendre nos voix.
Se
taire ? Jamais !